Koras Awards 2012: rire ou pleurer?
Grandiose, glamoureux, imposant, beau, majestueux, fabuleux, magnifique, immense, prestigieux, impressionnant…Ça devait être l´évènement culturel des superlatifs, l´apothéose musicale pour célébrer les filles et fils d´Afrique qui se sont distingués au cours de l´année en cours et qui finit sa course ce soir à minuit!
En soi, une idée noble. Rien à redire!
Si l´évènement avait répondu aux attentes, les organisateurs s´en seraient tirés à bon compte. Mais voilà, il a fini comme il avait commencé: dans la confusion, le chaos, en queue de poisson.
Tout le monde voyait venir ce fiasco même les organisateurs. Mais ils avaient choisi d´ignorer délibérément les réalités du terrain. À la manière de l´autruche, ils ont préféré enfouir leur entendement, leur bon sens dans le sable pour éviter de voir et d´entendre. Le résultat est là. Désastreux, catastrophique! Un vrai Waterloo culturel.
Cet évènement aurait peut-être une réussite si certaines réalités avaient été intégrées dans sa conception, sa planification et son exécution. Surtout la planification et l´organisation.
Tout d´abord, il fallait s´entendre, dans sa phase conceptuelle, sur le credo à donner à l´évènement. Promotion touristique ou promotion de la paix entre les ivoiriens? L´un n´implique pas forcément l´autre. Et vice-versa.
Mais on a entendu parfois « c´est pour promouvoir l´image de la Côte d´Ivoire » mais souvent aussi « c´est pour promouvoir la paix entre les ivoiriens ». Même là, c´était la cacophonie.
Et si l´intention était réellement la paix, on peut se poser des questions sur la nature de cette paix. La paix pour qui et entre qui? Pour ceux qui ont 1 million pour s´acheter un billet d´entrée? Ceux qui, au moindre coup de feu, peuvent rapatrier familles et biens en Occident? Combien sont-ils ceux qui peuvent se le permettre?
Combien sont-ils ceux qui peuvent investir 200.000 ou 15.000 francs CFA dans un ticket pour aller voir un artiste fut-il aussi célèbre que Chris Brown? Pour beaucoup de gens 15.000 pour un ticket, le choix est vite fait entre mourir de faim et voir Chris Brown.
Ça se demande dans les rues d´Abidjan: „un million pour le ticket; ils comptent sur qui?“. En tout cas pas sur une population qui tire le diable par la queue et dont l´état de paupérisation très avancé n´est invisible qu´à ceux qui vivent sur une autre planète.
Ensuite, l´organisation. La source de l´échec. Mal goupillé, mal ficelé, chaotique. Incroyable pour un événement qu´on prépare depuis 4 ans pour Mr Adjovi, et 1 an pour les financiers.
Vu le budget alloué à cet évènement (environ 2 milliards de francs CFA), il est effarent de constater la légèreté avec laquelle la chose a été menée. Un vrai bazar. Tout était laissé au hasard. Les trophées sont arrivés avant-hier, à un jour avant d´être remis aux récipiendaires. Pis, la grande Patience Dabani arrivée quelques jours plutôt, est retournée dépitée et dégoûtée en France. La pauvre a erré dans les rues d´Abidjan et peinait à trouver un interlocuteur. Voilà ce qui explique son absence à l´Hôtel voire. Chris Brown qui arrive un jour plus tard…Bref!
Il y auraient même des artistes qui n´ont pas daigné se déplacer du fait des incertitudes qui entouraient l´évènement. Trop de ratés!
À se demander aussi, pourquoi, malgré ce colossal budget, les lauréats n´aient pas obtenu, ne serait-ce qu´une symbolique compensation financière.
Pour ce budget, j´ai donné mon avis dans mon journal Facebook:
„Il y a d´autres priorités dans ce pays qui sort d´une longue et très grave crise militaro-politique et qui vient juste de rentrer dans les « grâces » du PTTE. La cherté de la vie, le chômage des jeunes sont quelques exemples. Combien de projets jeunes auraient pu être financés ou combien de ménages auront été soulage si la moitié du coût de ces Koras Awards étaient décaissée en subvention? En plus des efforts qui se font actuellement naturellement!“
Pour ceux qui condamnent qu´une récupération politique soit faite de la chose, une remarque: qui fait de la récupération politique quand la quasi totalité des ministres du gouvernement se donne rendez-vous à une manifestation culturelle? À part le Président, son épouse et quelques ministres, ils y étaient tous! Où étaient-ils, les acteurs culturels de ce pays?
Le gouvernement était au début de la chaîne (financement) et à la fin (allocutions et remises des trophées). Quand on prête le flanc à la critique, on s´étonne pas après d´être critiqué. C´est illogique! Le gouvernement doit assumer cet échec jusqu´au bout.
Ce n´est pas tirer sur le corbillard que de le dire.
Dans l´espoir qu´il fera attention à qui il confie des manifestation de cette envergure. Pourquoi ne pas essayer Yves Zogbo Junior? On l´oublie mais les Koras Awards ont été copié sur son „African Music Awards“ du début des années 90. D´autant que la décision a été prise en conseil de ministres de domicilier le concept en Côte d´Ivoire.
Et pourquoi à Mr Adjovi, ce „douteux homme d´affaires“ selon Libération? Son passé peu glorieux ne plaide pas en sa faveur mais il a quand même obtenu la faveur des décideurs en Côte d´Ivoire. De l´Afrique du Sud, où il a commencé, au Burkina Faso, en passant pas le Nigeria, il a toujours eu des démêlés avec la justice. Toujours en rapport avec les Koras Awards.
On me dira qu´il a demandé pardon. Pas difficile quand on empoche autant de millions.
Un internaute burkinabe résume bien la situation: „Koras Awards, la grosse arnaque de 2012 apres la fin du monde des Mayas“.
Les décideurs, les concepteurs et les organisateurs de ce genre de spectacles doivent se mettre, une chose dans le comprendo:
les temps ont changé, l´africain devient de plus en plus exigent et n´est plus prêt à accepter n´importe quoi! Il ne demande pas plus que ce qui est la norme ailleurs: qu´on le respecte.
Quand vous projetez quelque chose désormais, ne l´oubliez pas!
Les Koras Awards, pour conclure, a été un gâchis financier sans précédent et n´a pas atteint les objectifs fixés. Faut-il pour autant en rire ou en pleurer?
Personnellement, j´en pleure. Car l´argent qui est parti en fumée va manquer ailleurs. Pour les écoles, les bibliothèques, les hôpitaux, les projets jeunes…
Bravo quand même à toutes celles et ceux qui se sont impliqués de bonne foi. Le rêve deviendra un jour réalité. J´ai entendu un sénégalais dire hier, après réception de son trophée: „Sénégal xi kaw, Sénégal xi kanam“. Moi je dis „Côte d´Ivoire Up, Côte d´Ivoire forward“.
Je laisse le mot de la fin à Diaby Mohamed :
„Cote d’Ivoire, that country where Chris Brown is giving a free concert and stadium
is empty. Respect my people, we were here first „
mes respects ;Bien resumé
Tellement vrai ! En tant que pro je suis depitee par si peu de professionnalisme et cet irrespect